Occitanie - Francophonie - Méditerranées

Mois : octobre 2021

Rencontre avec Michel Moner, éminent cervantiste…

Professeur émérite de l’Université Jean Jaurès et spécialiste de Cervantès.

C’était notre deuxième rencontre. La première, à Toulouse, nous avait permit de faire connaissance. Elle été suivi d’échanges passionnants par mail et téléphone. M. Moner honore notre initiative de son soutien et ses conseils, et nous apporte, outre sa connaissance de premier ordre de Cervantès et de son oeuvre, ses encouragements et ses contacts académiques.

Cette fois-ci nous l’avons rencontré chez lui, en région toulousaine. Nous n’avons pas étonné de découvrir qu’il habite… un ancien moulin ! Le motif de notre visite était la réalisation d’une première vidéo sur le thème : « votre itinéraire avec Cervantès et Don Quichotte ».

Elle sera prochainement disponible sur le site. Le plus frappant, on le constatera dans cette vidéo, est de constater à quel point Don Quichotte et l’oeuvre de Cervantès peuvent « faire destin commun », voir synchronicité, avec la vie d’un passionné lecteur qui, en plus, leur a consacré sa vie professionnelle !

En attendant que notre vidéo soit montée, nous proposons de découvrir cette remarquable conférence que l’on trouve sur Youtube, une des dernières conférences, donnée en 2015 par Michel Moner, dans le cadre du Banquet du Livre de Lasgrasse. On y retrouve l’humour, la spontanéité et l’érudition de notre cher professeur !

« Le Gouvernement de Sancho » de Guérin de Bouscal

Avec un petit réseau d’amies, en coordination par Marie-Hélène Potier, nous avons démarré la transcription en français contemporain de la comédie « Le Gouvernement de Sancho » de Guérin de Bouscal


Nous avons pu commencer la transcription du texte de Guérin de Bouscal. Lequel commence ainsi…

« LE DUC A LA DUCHESSE
Quoi ! toujours condamner l’usage des plaisirs !
De grâce, résous-toi d’approuver mes désirs !
Tempère en ma faveur cette vertu sauvage,
Sois-moi plus complaisante, et ne sois pas si sage,
Et puisque Don Quichotte est revenu chez nous…

LA DUCHESSE
Mais, Seigneur, quel plaisir dans l’entretien des fous ? »

Nous découvrons petit à petit cette pièce de théâtre comique du Comte de Réalmont – qui fut longtemps au répertoire de la compagnie de Molière. Notre projet est d’envisager une adaptation contemporaine dans le cadre du Festival Don Quichotte.

Le mystère de Cid Hamet Benengeli – l’auteur morisque de Don Quichotte…

Nous savons que Don Quichotte est présenté par Cervantes comme une œuvre écrite par un arabe ou maure – il est tantôt « moro », tantôt « árabe »- Cide Hamete Benengeli, « sabio » (savant) et « historiador » (historien). Ainsi, Cervantès nous dit qu’il n’a fait que traduire en Castillan – grâce à un traducteur morisque – ce qui était supposé être un texte arabe à l’origine. 

Du moment que nous avons affaire à un roman fondateur qui prétend n’être qu’une traduction de l’arabe, voyons de plus prêt qui était Cide Hamete, ses fonctions dans le roman, et pourquoi Cervantes invente Cide Hamete l’historien, l’écrivain (escudriñador) ? Voilà donc les questions qui nous intéressent ici, du moins du point de vue de l’histoire littéraire.

C’est ainsi que commence l’article de M. Abbès Bahous, Professeur à l’Université de Mostaganem, en Algérie. Nous le remercions pour l’autorisation de diffusion de son excellent article, lequel fait un point judicieux sur une question bien controversée…!

L’étonnant Cardinal Cisnéros, l’Université de Alcala de Henarès et la Bible polyglotte…

Découvrir la vie du cardinal Francisco Jimenez de Cisnéros (1436 – 1515) est intéressant, entre autre pour se figurer le contexte intellectuel dans lequel évolua Miguel de Cervantès. Sachant que c’est dans cette ville que naquit, en 1547, l’auteur de Don Quichotte.

Dominique Aubier, dans sa monumentale exégèse « kabbalistique » de Don Quichotte met en avant le rôle singulier de celui qui fut Grand Inquisiteur, Régent d’Espagne et confesseur particulier de la Reine Isabelle de Castille.

Il fut le fondateur (pour d’autres « revivificateur) de l’extraordinaire Université de Alcala de Hénarès, qui, à l’opposé de celles de Paris et de Salamanque, fut consacrée exclusivement « aux humanités ». Paradoxalement, en plein climat de suspicion inquisitoriale, on y enseignait le latin, le grec mais aussi l’arabe et l’hébreu…
L’Université forma une pépinière des plus grands esprits de l’âge d’or espagnol : Tirso de Molina, Quevedo, Lope de Vega, Calderon de la Barca…

Tout au long de son activité d’inquisiteur, notamment à Grenade en 1492, il ne cessa de récupérer de précieux manuscrits pour constituer la bibliothèque de l’Université, réservant les plus précieux à sa bibliothèque privée.

Outre l’Université, que François Ier visita en 1528, le cardinal Cisnéros est connu pour avoir édité la première grammaire grecque imprimée en Espagne (1514), un dictionnaire hébreu-castillan, mais surtout la Bible Polyglotte ou Complutense.

Traducteurs et théologiens avaient besoin d’une Bible dans les langues originales, ainsi que d’une version latine améliorée. En 1502, le cardinal Cisneros, a décidé de répondre à leurs besoins par un seul livre. Cette aide à la traduction, qui a fait date, a été appelée la Polyglotte de Complute.

L’objectif de Cisneros était d’avoir une Bible polyglotte, autrement dit en plusieurs langues, qui rassemble les meilleurs textes hébreu, grec et latin, ainsi que certaines portions en araméen. Cet ouvrage serait aussi un événement marquant dans le domaine de l’imprimerie, qui en était encore à ses balbutiements.

Pour se lancer dans cette tâche colossale, Cisneros a acheté – à ses frais- d’anciens manuscrits hébreux, qui abondaient en Espagne. Il a aussi réuni divers manuscrits grecs et latins. Tous ces documents serviraient de base au texte de la Polyglotte. Il a organisé un groupe d’érudits à l’université d’Alcalá de Henares et leur a confié le travail de compilation. Parmi ceux qui avaient été invités figurait Érasme, de Rotterdam, mais ce linguiste éminent a décliné l’invitation.

La compilation de cette œuvre monumentale a représenté pour ces érudits un travail de dix ans, auxquels se sont ajoutés quatre ans pour l’impression. Les difficultés techniques étaient nombreuses, car les imprimeurs espagnols ne disposaient pas de caractères hébreux, grecs et araméens.

Cisneros s’est donc assuré les services d’un maître imprimeur, Arnao Guillén de Brocar, pour qu’il prépare les caractères de ces langues. Le travail d’impression a finalement débuté en 1514. Les six volumes de cet ouvrage ont été achevés le 10 juillet 1517, quatre mois seulement avant la mort du cardinal. On en a produit environ 600 exemplaires, paradoxalement au moment même où l’Inquisition espagnole était à son paroxysme.

Il est intéressant de savoir que c’est à Alcala de Henarès que naquit Miguel de Cervantès, et qu’il fréquenta l’Université dont nous venons de voir qu’elle ne fut ni anodine dans l’histoire de la pensée de l’Espagne, ni dans l’histoire des langues et des religions de son temps.

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